Avant-Propos
Salut à toi, Autrice, Auteur, Lectrice, Lecteur ou Curieux, moi c’est Big Brother ! Après un temps d’absence, me revoici pour ton plus grand plaisir.
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1 • Un bon concept, mais une mauvaise exécution
Un titre BON mais pas assez évocateur du contenu du récit
Légendaire Réalité… Sincèrement, je trouve ce titre très cool. Je suis fan de SF/Fantasy et je me suis mis à rêver renouer avec mes premiers romans de chevalerie, plutôt qu’un énième YA de dystopie. Ou bien une dystopie sur fond de guerres mythologiques. A la place, tu nous proposes un scénario qui sur le papier me ravissait encore plus : une invasion extra-terrestre d’une terre du future, semble-t-il, qui ne pourrait cesser que si des êtres de légendes se dressent contre les envahisseurs. T’ai-je dit que j’étais un grand fan de Space Opéra également ? Pour moi, Légendaire Réalité serait l’annonce d’une guerre épique entre des envahisseurs tout-puissants qui agissent comme des dieux sur Terre, on en reviendra dans les parties message et univers, et nos anciens mythes, symboles de l’Histoire que l’on tente d’effacer et qui s’incarne dans la nouvelle génération à laquelle les E.T. ont volé le passé.
Tout ça pour dire que le titre est très bon pour moi : prête au rêve, à l’épique et à une grande aventure. Soutenu par un très bon résumé, je l’aurais acheté sans hésiter.
Cependant, suite à ma lecture, je le trouve trompeur. Pourquoi ? Car si tu évoques bien des légendes et leur laisse parfois toute (trop) la place, j’en parle juste après, je n’ai pas eu cet émerveillement, de même que tes héros, en les découvrant. Par exemple au début du roman, on a une citation évoquant le Roi Arthur. Pourquoi lui ? Qu’a-t-il réalisé dans ton univers pour les humains pour être plus important que Zeus par exemple ? J’ai surtout eu l’impression d’avoir un catalogue de légendes traitées rapidement et sans profondeur, qu’une réelle volonté de me présenter une légende et me donner envie de la connaître plus. Mais ça c’est la faute à la narration et à une deuxième chose : le manque de phase d’exposition et d’explications de ces légendes dans le récit.
Passons à la deuxième partie du titre, car c’est en lien : Réalité. Comme pour Légendaire, en dehors de Roxane, aucune légende ne m’a semblé autre chose qu’un outil narratif (cf. les Kobolds) On n’a jamais ou peu de descriptions physiques, on ne sait réellement comment ils vivent, voire pire (cf. Univers) certains n’ont pas de noms. Or, ton récit raconte quoi à la base ? Des adolescents en quête d’identité, sans passé, qui découvrent du jour au lendemain que sur la terre oppressée par des E.T. existent un ou plusieurs espoirs tous droits venus du passé : des légendes. Sauf qu’à aucun moment on ne voit cet étonnement de la part de tes héros, voire un chamboulement, car ils rencontrent des êtres surpuissants ou quasi omniscients (Merlin, Roxane). Ils vont même littéralement dans deux autres dimensions, mais il n’y a pas d’étonnement, de prise de recul ou même de volonté de nous présenter ce monde de légende. Je reviendrai plus en amont sur ton traitement de l’univers et m’arrêterai ici pour le moment.
Pour résumer mon avis sur le titre, il est très bon, mais pour le moment trop en décalage avec le contenu de ton roman. Tu es surtout attaché aux légendes arthuriennes et celtes, me semble-t-il, non pas aux légendes humaines dans leur ensemble. Si tu ne souhaites pas en explorer plus, histoire de ne pas décevoir, je te conseillerai de justement choisir un mot ou une expression qui rappellerait à quelles légendes nous aurons affaire. Par exemple Les Trois Légendes ou réabhlóid (révolution en irlandais, même si c’est un peu compliqué à prononcer). J’ai fait quelques recherches sur les langues celtes et pour moi tu devrais peut-être inventer un nom sur base de ces langues qui désignerait tes élus qui sont en eux-mêmes en train de devenir une légende en fait (cf partie message). Ça nous plongerait dans ton univers sans être déçu et toucherait directement les amoureux des légendes européennes.
Enfin passons au scénario en lui-même…
Un bon concept mais soutenu par un scénario trop ramassé et incohérent
Comme dit plus tôt, comme pour le titre, le scénario de base avait tout pour plaire. Cependant, je lui reproche plusieurs choses de façon générale, mais que j’ai ressenti à trop points du roman.
Du prologue au chapitre 5-6, j’ai vraiment eu du mal à croire à ce que tu me présentais, à m’accrocher et comprendre les personnages et encore plus à avoir envie de suivre ton histoire. La raison ? Tu ne prends pas assez le temps pour exposer ton univers et tes personnages afin de permettre l’intégration. Tu nous présentes des règles cruciales à ton univers, très intéressantes pour rajouter de la tension, mais au final le scénario l’oublie. Le prologue ou même le chapitre 3. Ce chapitre devait présenter nos héros dans leur vie quotidienne aux côtés d’autres humains. On aurait pu voir le colisée évoqué dans le prologue et par Isabelle, avoir une idée plus claire de l’oppression des E.T. sur les Hommes. Sauf qu’on ne voit jamais aucun de tes héros interagir avec les autres, ni décrire son environnement nature. Or, Jonathan a perdu toute sa famille, enfin je crois. Pourquoi va-t-il de ville en ville si ce dont il a besoin c’est surtout d’un travail ? Plus simple : à quoi ressemble monde des Hommes ? Il y a-t-il des E.T. sur tout le globe ou juste en Angleterre ? Ont-ils affecté le monde jusque dans son système politique ? Il y a-t-il encore des villes ? Quel est le quotidien d’un humain sous domination E.T..
Comme pour toute œuvre avec un univers inédit, je pense qu’avant de nous embarquer dans toute cette histoire d’élu, tu devrais mobiliser les premières pages pour planter le cadre spatio-temporel et les premières raisons pour lesquelles il est nécessaire que nos héros se débarrassent d’eux. Tu créerais ainsi une réelle ambiance et un vrai attachement à tes personnages, car on les aura côtoyés dans leur cadre de vie personnelle avec leurs envies et combats avant le début de leur quête (cf. Personnages).
Si on passe ce début un peu précipité, ma deuxième remarque porte sur l’ensemble du récit : bien qu’il soit intéressant de nous faire découvrir tous ces peuple au cours de leur voyage, j’ai vraiment eu l’impression pendant tout le roman qu’ils étaient des aides divines pour accélérer leur progression. Pourquoi ? Car dès qu’ils se sont rassemblés, ils ont enchaîné les rencontres sans souffler, à chaque fois pour gagner un pouvoir ou se sortir d’un mauvais sort, sans qu’on s’intéresse plus au peuple en question, sauf pour Roxane. Voici une petite liste qui prouve cela :
- Le vieil homme et le Stonehenge : expliciter l’intrigue
- Scatach : développer leurs pouvoirs
- Les Kobolds : les libérer des E.T. sans explication et leur donner un indice
- Les Bansidhs : les aider dans presque toutes les quêtes restantes et servir d’intérêt amoureux pour James
- Merlin : ramener à la vie les héros
- Arthur et ses Hommes : gagner contre les E.T. malgré le sous nombre
On les enchaîne tous les uns après les autres comme s’ils étaient tous présents sur la même route, mais ça plusieurs effets négatifs :
- Donner un côté répétitif au récit, car on sait que chaque problème va être résolu par un nouveau personnage et non par nos héros par eux-mêmes
- Du coup, on se demande pourquoi les êtres que tu nous as présentés ne sauvent pas la Terre eux-mêmes, car ils semblent hautement plus puissants et sages que notre trio –surtout les Kobolds qui vont jusqu’à s’infiltrer chez l’ennemi
- Un manque de tension à cause du désamorçage continu des intrigues et des points de tensions. Par exemple lorsque les Bansidhs retrouvent James et Isabelle à demi-morts, une des fées dit mot pour mot « pas d’inquiétude, il y a une solution ».
En littérature, c’est dans le milieu de l’œuvre que vont s’accumuler les péripéties. Et si j’ai beaucoup apprécié toute l’étape sur l’île avec le dragon qui était très bien construite et pensée, de façon générale on a vraiment un « ventre mou » que tu peux éviter en remaniant ton scénario et surtout la façon dont les éléments s’agencent. J’ai ressenti aussi un grand amour de culture celte, mais à cause cette narration réduite à son strict minimum, tu ne nous le partages pas toujours, ou alors en blocs indigestes.
Puis vient le dernier arc narratif de ton roman : la guerre avec les E.T. Si on y retrouve tout ce côté trop précipité et peu développé que j’évoquais plus tôt, on sent surtout ton envie d’en finir : il n’y avait aucune scène épique, aucune compréhension sur la façon dont s’est faite la guerre et il y a un enchaînement d’incohérences qui m’a fait hurler par moments.
Prends des risques pour créer la meilleure œuvre possible !
Mais tout ça pour moi est dû à une seule raison : un manque de préparation et donc d’ambitions. Comme dit au tout début de cette fiche, le concept est bon, intéressant. Sauf que sous-exploité, comme le reste : tu as un trio de héros forts, là où on a souvent un seul personnage mis en avant, un univers qui ne demande qu’à être développé, puisque la guerre devrait se dérouler sur LA PLANÈTE ENTIÈRE, mais tu te restreints à quelques bouts de pays. C’est dommage. Pour moi, tu as une idée potentielle pour faire plus d’un Tome juste sur cette première bataille (et non guerre !), mais tu tentes de le caler en un tome. Ça ne tient pas : tes personnages, ton univers et tes lecteurs ne respirent pas, ne peuvent se développer normalement. Tu es même obligée de faire des ellipses sur des points cruciaux, et la fin tu cours et balaye tout, laissant le lecteur avec un « c’est ça la fin ? ». Alors que tu m’as chauffé tout le tome sur une guerre entre des envahisseurs omniscients face à d’anciens dieux : n’est pas le scénario d’Avengers 1 ? (Je dis ça en bien)
Comment résoudre ce problème ? Reprendre tout et approfondir les choses pour gommer les incohérences et sortir de toutes les facilités scénaristiques qui parsèment le texte. Ça te permettra de développer au mieux ton univers, de mieux nous faire comprendre les relations entre les personnages, surtout amoureuses qui font artificielles, et enfin les messages. Je t’invite vraiment à lire la partie message, car à ce niveau Légendaire Réalité a un gros potentiel, surtout dans notre monde actuel.
2 • Un univers creux ?
Au début du roman, les héros ne semblent pas du tout appartenir à ce monde et échappent même à certaines règles posées à la base, comme le fait que les E.T voient tout et interdisent la réunion de deux-trois personnes. Je trouvais cette idée super intéressante, sauf que ça n’a été utilisé que vers la fin et en réaction à l’action des héros, là où ce facteur devrait faire partie intégrante de ton univers, car si je ne crois pas à l’univers que tu me présentes, comment pourrais-je croire à ce qui s’y déroule et donc vouloir le sauver ?
Pour moi, plusieurs points de fonds devraient être clarifiés :
- Quand, pourquoi et comment les envahisseurs ont pris le contrôle de la Terre ? Dans ta version actuelle, on ne connait pas du tout les ambitions des envahisseurs. Les envahisseurs dans leur construction n’ont rien d’effrayants. Les héros arrivent vite à leur niveau de puissance, d’ailleurs, et nous ne verrons jamais combattre leur chef car il est vaincu en une ellipse. Désolé, mais j’ai eu l’impression de lire un épisode de power rangers : ils apparaissent de nulle part, font une tentative, perdent et disparaissent. N’étaient-ils pas plus préparés que ça ? Ils avaient pourtant l’air d’avoir un plan en tête puisqu’ils s’étaient renseignés sur les êtres fantastiques qui peuplent la Terre et la prophétie. Et malgré toute cette préparation, ils se laissent éjecter aussi facilement ? De même, on parle d’être venus d’ailleurs avec des vaisseaux spatiaux, avec une avance technologique et scientifique, mais par exemple ils parlaient très peu entre eux et je crois qu’à un moment ils tuent l’un des leurs blessés. Ils passent plus pour des barbares qu’un peuple assez intelligent pour vaincre les humains et leurs siècles d’évolution. Donc pour moi, tu dois vraiment penser la raison pour laquelle les envahisseurs se trouve sur Terre, car à l’heure actuelle, le livre fini, je me demande encore pourquoi ils ont lancé cette invasion et leur lien avec Arthur. Et surtout le pourquoi : si la raison est légitime, ça pourrait donner une vraie profondeur à tes ennemis.
Réfléchis aussi au comment, car dans ton histoire toute l’action se localise au Royaume-Uni je crois. Or, il y a plusieurs continents sur Terre. Donc même si le chef se trouve là-bas, il a forcément des lieutenants dispersés à travers le globe. Et donc pourquoi pas face à eux d’autres légendes japonaises, africaines, amérindiennes qui eux aussi s’éveilleraient (j’y viens juste après)
- Et s’ils n’avaient pas envahis la Terre, mais libérée du premier envahisseur de la planète bleue : l’Homme ? A partir de cette idée, imagine la confrontation entre les envahisseurs et les héros : ça aura plus de profondeur et d’intérêt que le grand méchant qui explique son plan, car son acte serait presque légitime. A ce moment-là tu fais se poser des questions au lecteur sur son rapport à la planète et donc à sa culture (cf. partie Fond), car pour moi les envahisseurs sont en fait une allégorie de toutes les actions humaines qui impactent négativement la planète et sa culture.
- Quels impacts ont eu les envahisseurs sur l’humanité ? Au début du roman tu parles d’une arène. Elle n’est évoquée qu’une seule fois après par Isabelle. Or, on est au 27e siècle au début du roman et les E.T sont là depuis le 26e ! Pourquoi une arène ? A quoi ressemble-t-elle ? Et les villes ? Il y a-t-il encore des villes, même ? Une police ? Certains métiers ont-ils disparu au profit d’autres ? En résumé : qu’est-ce c’est qu’une semaine banale dans ton univers ? Je ne sais pas, car à aucun moment tu ne nous montres le monde des Hommes, et rapidement celui des êtres fantastiques. Résultat, je n’ai pas le choc culturel quand nos héros rencontrent les autres races.
- Quelle relation ont les Hommes avec leur passé et les mythes ? Pour moi, c’est LA question primordiale, car la réelle problématique de ton roman. Pourquoi ? Car on a des envahisseurs qui, normalement, imposent leur mode de fonctionnement (dont leur culture) à plusieurs autres races. Or, cette race a son histoire, son passé et ses mythes. Et dans Légendaire Réalité, ces mythes prennent vie dans nos héros et sur toute la Terre à travers le conte du roi Arthur. C’est une super idée, car les E.T incarnent un peu ce modernisme froid qui avance sans se préoccuper du passé et nos mythes ce qui raccrochent le trio à la Terre (vu qu’ils étaient utilisés pour transmettre des leçons, des coutumes, de la sagesse) pour finalement la sauver. Le problème c’est que nos héros qui sont nés bien après l’invasion de la Terre connaissent des mythes supposés disparus et surtout ne se questionnent pas sur le fait qu’il existe sur leur planète d’autres races comme les Kobolds. De ce que je sache, nous ne sommes pas dans un monde alternatif au nôtre. Donc, pour eux aussi les fées et les dragons n’existent pas, n’est-ce pas ? Peut-être même que les documents relatant du Moyen-Âge ont même été effacés par le temps et les E.T. Dans tous les cas, avant que les péripéties ne démarrent réellement, on doit à un moment donné expliciter l’état des connaissances humaines depuis l’invasion (ou même avant), car là nos héros enchaînent les rencontres anodines avec des mythes et légendes et ça ne l’émeut pas plus. Pas même un peu d’excitation.
En définitive, comme pour ton récit, je pense que tu dois prendre le temps de poser la situation initiale de ton univers et ses enjeux avant de rentrer dans l’action pour faciliter notre adhésion à celui-ci et surtout sa compréhension. Car même à la fin du roman des questions élémentaires me restent encore et si c’est un one shot ça ne devrait pas être le cas.
Passons maintenant à d’autres points, pas moins importants, mais qui vont découler du travail réalisé sur les questions du dessus :
- Comment sont repartis les E.T sur la planète ?
- Il y a-t-il plusieurs stades d’évolution ou grade chez les E.T ? Quelles différences ont-ils ?
- Il y a-t-il d’autres groupes rebelles ?
- Quelle est l’échelle de puissance des E.T par rapport à un humain sans pouvoir ? Avec pouvoir ? De même pour un humain avec des pouvoirs. Pourquoi je te pose cette question ? Car après seulement un entraînement de quelques jours nos héros rivalisent presque avec des envahisseurs qui sont des soldats surentraînés. Comment est-ce possible ?
3 • Des Personnages sous-exploités
Pour moi il s’agit d’une des raisons de lire ton roman : ton trio de héros. Ils doivent être nos yeux et nous permettre de découvrir ce monde, mais aussi nous faire réfléchir sur différents thèmes par leurs réactions, leur histoire etc. Autant dire que des héros vides ou incohérents rebutent un lecteur et donc un éditeur. Du coup que dire de ton trio ?
- Des personnages sous-exploités
C’est l’avis que j’ai eu à la fin de ma lecture. Pourquoi je pense ça ? Pour cela, reprenons leur histoire individuelle :
- James, l’ancien rebelle couard qui veut devenir un héros pour se racheter une conscience
- Isabelle, une adolescente abandonnée par ses parents qui ont préféré mourir ensemble en amoureux plutôt que de protéger leur fille. Elle a appris sur le tas à survivre et ne devrait (j’y reviens) faire confiance à personne, encore moins aux hommes après ce que son père lui a fait
- Jonathan, le gars sans histoire qui a tout perdu et se voit soudain doter des pouvoirs nécessaires pour libérer l’humanité. Il a un cœur pur et n’hésite pas à partir à la rescousse des autres
Voilà le portrait que tu nous as donné de tes trois héros dans les premières pages du roman. Le problème ? C’est qu’au fur et à mesure que l’histoire avance ils passent d’adolescents à la vie rude et futurs sauveurs de l’humanité à trois jeunes en balade qui se laissent bousculer/porter par tout ce qui les entoure.
Prenons, James : il a été entraîné à l’art de la guerre, n’est-ce pas ? Certes, il était nul ou lâche, mais il a suivi ces formations. Pourquoi dans aucun de ses combats, ou presque, il ne se positionne en stratège ou comme le « vétéran » qui prend au sérieux cette mission ? Pire : il voit Isabelle tue un autre animal ; il s’enfuit. Scatach lui crie dessus ; il s’enfuit. Mets-toi à sa place : lui qui n’a pas pu sauver ses compagnons de bataille, il a enfin le pouvoir pour sauver le monde entier. Il devrait passer son temps à s’entraîner pour rattraper le temps perdu et être motivé par le fait qu’il est l’un des derniers rebelles de la planète. Non, à chaque fois qu’il agit c’est juste pour montrer à Isabelle qu’il est meilleur que Jonathan afin de la séduire. On parle d’un garçon qui a vécu toute sa vie pour affronter les envahisseurs. Est-ce que sa motivation première doit être une fille ? Dans le pire des cas, tu aurais pu jouer sur ça : Isabelle pourrait l’intéresser, mais il se bat contre ses sentiments, car ce sont ces mêmes sentiments qu’il verrait comme une faiblesse en temps de guerre, et décide de se battre pour qu’elle soit justement heureuse. Et quand elle finit avec Jonathan ça l’énerve, mais il voit la mission avant la fille, comme s’infligeant une punition. Mais du coup sa relation avec Jonathan se verrait changer : il ne veut pas le battre pour plaire à Isabelle, mais parce qu’il doit être littéralement l’homme le plus fort du monde pour vaincre les E.T. Sauf qu’il serait frustré de voir que la force qu’il a cherché à avoir par l’entraînement, son rival l’a presque naturellement. Tu peux alors parler de plusieurs thèmes à travers ce personnage : qu’est-ce que la force ? Nait-on héros ou le devient-on ? Car James veut devenir une Légende à son tour, pas un humain lambda avec une fée pour copine. Je n’ai pas compris du tout son évolution, qui ressemble à celle de l’ado sans histoire de roman young adult alors qu’il porte un plus lourd fardeau, à savoir la mort de ses alliés.
Vient ensuite Jonathan. Il est pour moi le moins intéressant des trois, car est l’archétype du héros vu tant de fois : il a tout perdu à cause des E.T. et grâce aux pouvoir des divinités il va enfin pouvoir protéger ce qu’il reste de la Terre. Si James est le soldat vétéran qui voue sa vie à la traque et la mort des E.T., le batman, Jonathan serait le gardien au cœur pur, le superman. Et comment le rendre intéressant ? En l’interrogeant sur la légitimité de son combat. Imagine : tu voues une haine sans mesure au meurtrier de ta mère et tu apprends en parlant à l’un d’eux que s’ils nous tuent c’est parce qu’ils ont vu les Hommes détruire leur planète et eux souhaitent l’utiliser pour lui redonner une seconde jeunesse et y vivre, car leur peuple n’a plus de planète. A ce moment-là, Jonathan a tellement un cœur pur qu’il pourrait même se dire que la mort de sa mère serait justifiée, que l’on que ce qu’on mérite. Pour mettre cela en exergue, il suffirait que les envahisseurs lui montrent à quoi ressemblait la planète avant leur arrivée par exemple et que maintenant ils ont régulé nos naissances, nos consommations et surtout notre pollution. Imagine James qui hésite même à changer de camp, car il pense que les envahisseurs feraient de meilleurs leaders que l’Homme ? Là il est plus intéressant que le personnage lisse et gentil que tu nous as dépeint. Pour un personnage avec aussi peu de défauts comme lui, le meilleur moyen de le rendre intéressant c’est que ses qualités soient sa faiblesse.
Dans la même idée, il pourrait aussi s’interroger sur légitimité du combat : est-ce qu’il n’y aurait pas une place pour les E.T sur la planète, tout comme il y a plein d’autres races toutes aussi bizarres ? Un accord n’est-il pas mieux qu’une guerre
Et enfin ma grande déception : Isabelle. Pour elle, je n’ai pas du tout compris le chemin que tu lui as fait prendre. Le roman débute, on le saura plus tard, sur sa famille qui fuit une arène dans laquelle son père se battait. Elle est donc habituée à voir des combats et sait que la vie est dure. Par la suite, elle doit vivre dans la nature dès sont plus jeune âge. D’après les dates que tu nous donnes elle doit avoir trois-quatre ans. Et on la retrouve à 17 ans, après que ses parents aient été enlevés par les E.T. SAUF que ce n’est pas un simple enlèvement : son père (c’est important) aurait pu rester avec elle et fuir, en se disant que c’est ce que sa mère aurait voulu. NON, et j’ai trouvé l’idée très bonne, son père qu’elle doit sûrement voir comme un héros, l’abandonne pour rejoindre sa mère. Elle finit seule dans la jungle et doit survivre. A ton avis quel genre de personnalité peut naître d’une telle vie ? Solitaire, froide, colérique, antipathique et droit au but. Elle a dû apprendre à chasser, à se défendre et surtout à ne compter sur personne, surtout pas sur les hommes. Pourquoi ? Car elle s’est fait abandonner par sa seule famille !
Sauf qu’encore une fois, tu l’as changé en quelques lignes de la fille solitaire au profil atypique à la gourde de service qui a besoin de l’aide des mecs, qui a peur du sang et qui tombe amoureuse d’un gars qu’elle ne connait pas. J’ai trouvé ça dommage et c’est pour moi le personnage le plus sous-exploité du roman. Chez Scatach, au lieu d’être en pleur, ça aurait été intéressant qu’elle ressente une certaine jouissance : elle a enfin le pouvoir d’extérioriser toute sa rage en elle, mais cela nous interroge sur son humanité. Et du coup sa relation avec Jonathan est logique : elle pourrait tomber amoureuse de lui petit à petit, car là où elle se pense sans valeur, inhumaine, justifiant presque l’abandon de ses parents, Jonathan est la gentillesse incarnée et il lui montre comment la force peut être mise au service des Hommes. En plus, malgré son pouvoir, il est digne de confiance. Pour moi, Isabelle pourrait même être une génie du combat, mais dont la vie en solitaire la rend méfiante de tout le monde, à commencer par James et Jonathan qui sont peu dégourdis. Peut-être même qu’elle pense que l’humanité mérite son sort et que les deux garçons arriveront à la changer, ainsi que les peuples rencontrés pendant le voyage.
En définitive, ton trio de tête aurait pu être mieux travailler et nous apporter des échanges et des scènes marquantes. Mais pour cela, tu dois faire un vrai travail sur leur psychologie, car tu as tellement voulu les faire rentrer dans les cases des romans Young Adult classiques qu’on aurait pu les prendre dans un autre roman ça aurait la même chose. Ce qui est dommage.
- Avait-on besoin d’eux pour sauver la Terre ?
C’est la question que je me suis posé tout au long du récit. Au final qu’ont-ils accompli ? Il y a une prophétie sur eux, mais tout leur tombe dans le bec :
- L’esprit d’une des légendes les guide jusqu’à Scatach
- Un esprit leur parle dans la prison, quelques jours après leur entraînement, et un Kobold apparaît par magie pour les sortir de la prison des envahisseurs
- Merlin les soigne et est dit assez puissant pour faire peur aux envahisseurs
- Morgane les sauve et les mène à un artéfact
- Une bansidh ouvre par magie la porte, sans utiliser les artéfacts qu’ils ont mis du temps à chercher
- Arthur et ses hommes viennent à bout des E.T.
A part pour le dragon, et ils ont provoqué cette situation, je ne me souviens pas d’une seule action où si ça n’avait pas été eux le sort de la planète serait jeté. Même lorsqu’ils se battent, ils ne deviennent pas plus fort, mais laissent les légendes prendre le contrôle de leur corps et à mesure qu’ils s’habituent l’esprit devient plus puissant.
De plus, ils rencontrent des peuples et des personnages qui sont dix ou vingt fois plus puissant qu’eux. Pourquoi ils ne s’allient pas pour venir à bout des E.T. alors qu’ils savent que les uns et les autres existent ?
C’est pour moi le deuxième défaut de ton trio : ils subissent les choses et elles se résolvent d’elle-même presque à chaque fois. Comment changer cela ? Simple : ils n’arrivent pas à ouvrir la porte et décident qu’ils vont créer une résistance. Ou bien Arthur meurt à la guerre et ils deviennent les leaders d’une alliance avec tous les êtres rencontrés pendant leur voyage. Il faut une action marquante, car s’il fallait juste quelqu’un pour transporter les clés et ouvrir la porte, pourquoi Arthur n’a pas envoyé un message à Roxane et Merlin ?
Mais passons aux autres peuples. Comme dit dans la partie Scénario, ils n’ont aucune profondeur, sauf les Bansidhs et Roxane : ce sont des outils narratifs. Auraient-ils rencontré les Kobolds s’ils n’avaient pas été capturés ? Non. Auraient-ils rencontré les Bansidhs si James n’avait pas besoin de copine et qu’ils leur faillent un moyen de locomotion ? Non. La preuve : tu n’as même pas travaillé le rapport de taille entre les personnages. Les Kobolds sont tous petits, mais à aucun moment nos héros ont un problème pour se déplacer dans leur ville ou s’interroge sur le fait qu’une si petite taille puisse être un désavantage. D’ailleurs on ne sait même pas comment les Kobolds ont su que nos héros étaient prisonniers. Côté Bansidhs, on ne sait rien de leur culture et surtout de comment ils ont pu passer inaperçus aussi longtemps alors qu’ils vivent en haut d’une plaine visible de tous. Sauf des E.T. étrangement. La seule scène marquante dans leur arc : la relation sexuelle sans explication avec James.
Je n’évoquerai pas les E.T, car je le fais assez dans la partie Univers. Et au sujet d’Arthur et cie, rdv dans la partie scénario, mais c’est le même problème que pour les autres : ils sont creux.
En définitive, je pense que tes personnages manquent d’un travail préparatoire et que pour certains tu t’es contentée de reprendre les légendes. Sauf que personnellement je ne les connaissais pas et les éléments que tu m’as donné n’ont pas suffi à attirer ma curiosité, sauf Roxane encore une fois. Tu devrais prendre le temps de faire des fiches personnages, car tu en as beaucoup et aussi des fiches dédiées aux races.
4 • Un Potentiel thématique mis sous silence
Passons maintenant à la partie la plus importante à mes yeux : les thèmes, les messages et les valeurs que tu souhaites véhiculer à travers ton roman. Dans cette partie, je vais mettre en évidence les thèmes que tu sembles avoir évoqué, mais aussi ceux qui auraient pu faire partie des messages majeurs de l’œuvre.
L’amour : que ce soit avec notre trio, la bansidh et l’humain, Merlin ou Roxane, tu veux à tout prix nous parler de cela. Et c’est tout à ton honneur. Sauf que toutes les histoires d’amour qui naissent dans le roman sont creuses. Et pour le prouver, je ne reprendrai les mots de la copine de James. Pourquoi tu l’aimes : « je ne sais pas ». Ils n’ont rien vécu ensemble, James est intéressé par Isabelle et parce qu’elle lui dit qu’elle l’aime et couche avec elle il l’aime. Est-ce ainsi que tu vois se former des couples autour de toi ? Je n’ai rien contre ce thème, mais pour le moment il est trop bâclé, car on ne croit à aucune histoire d’amour. Je t’invite à voir ma proposition pour le couple Isabelle/Jonathan dans la partie personnage 😉
Notre relation au passé et à soi : c’est le thème majeur et ça se sent. Tous les personnages clés ont un flash-back, voire deux, pour expliquer leur parcours. Puis, chacun d’eux doit affronter ses démons du passé pour avancer. Si on oublie le traitement de notre trio, car ils sont les premiers concernés par ce thème, tu as très traité ce thème avec Roxane et les Bansidhs je trouve.
MAIS, ce thème pourrait gagner en profondeur si tu faisais s’interroger les personnages sur ce passé, sans forcément utiliser les flash-back. Par exemple : pourquoi est-ce que tout le monde croit que les héros de la légende existe alors que les E.T. ont tout fait pour effacer leurs traces et que ce sont des mythes ?
Ou mieux : le futur que propose les E.T. n’est-il pas meilleur que la vie passée par les Hommes ?
Et enfin, je vais me répéter, mais on a des mythes (donc des êtres du passé) qui affrontent des E.T. dotés d’une technologie du futur. C’est l’allégorie parfaite du modernisme contre le passéisme.
Sinon ton roman débutait avec des thèmes, mais au final on ne les voit jamais développés :
- Notre relation avec la nature, dont la pollution
- Les relations interraciales : en dehors d’un flashback d’un Bansidh qui arrive comme ça, on n’en parle jamais, alors qu’on passe le ¾ du roman à côtoyer des êtres fantastiques. Ça devrait être une question centrale
- Nos peurs, même si on retrouve le thème du passé
Et voici des thèmes mineures :
- Le statut de légende : bah oui. C’est bête, mais pourquoi et comment devient-on une légende ? A-t-on des responsabilités ? Ou tous les droits ? Sommes-nous toujours humains ou au-dessus ?
- Sommes-nous le centre de l’univers ? Dans ton œuvre on apprend qu’en plus des Hommes il y a des extraterrestres, mais aussi tout plein d’être sur Terre. Or, nous prenons toujours des décisions en nous considérant comme les maîtres de tout. Prenons le réchauffement climatique : on se dit responsable. Mais si sur notre Terre il y a aussi des Kobolds, peut-être qu’eux aussi ont leur part de responsabilité non ? Ou leur mot à dire ? On revient sur ce que je te disais dans la partie univers : l’Homme sait-il pour les autres races et quelles relations entretiennent-ils avec celles-ci ?
Et j’aurais pu continuer, mais je pense que je finirai par dénaturer ton œuvre. Tout ça pour dire que ton roman pourrait évoquer pas mal de choses, mais pour cela il va falloir que tu laisses de l’espace dans ta narration pour des temps de réflexion et des échanges pertinents, malgré la course folle que vivent nos héros. Sinon, on finira l’œuvre sans aucun souvenir.
5 • Une Forme en-dessous des standards
Au sujet de la forme, je vais te faire ici toutes mes remarques et je ne pense pas les évoquer dans les analyses par arcs narratifs, car ce sont les mêmes qui reviennent et ça finirait par te décourager. Ce n’est pas mon but, mais ça doit être dit :
- Un vocabulaire peu développé ou mal maîtrisé : il y a de nombreuses répétitions de mots, d’expressions ou de verbes, parfois à quelques lignes ou mots d’écart. Par exemple : « Baiser amer, baiser d’au revoir qui devient passion, la séparation n’en devint que plus douloureuse »
- La solution : cherche des dictionnaires de synonymes en ligne 😉
- Une surutilisation des auxiliaires : les éditeurs détectent un texte pauvre lexicalement en comptant le nombre d’auxiliaire utilisé. Et dans ton texte ça en regorge.
- La solution : comme au point 1, essaye de trouver des synonymes pour en utiliser le moins possible
- Une ponctuation hasardeuse qui rend certaines phrases incompréhensibles. Tu ne sembles pas savoir quand placer de point ou de virgule. Du coup, on a parfois des phrases trèèèèèès longues, avec deux trois sujets et verbes qui se suivent.
- La solution : on a tendance à croire que plus une phrase est longue et plus ça va montrer à l’auteur que l’on est bon écrivain. C’est faux, mais c’est une idée que tous les jeunes auteurs se font. Pour régler ce problème, fait d’abord des phrases très simples : un sujet, un verbe, un complément et potentiellement une relative.
- Des dialogues non conventionnelles. Malheureusement, tu ne connais pas du tout les règles de base de la construction des dialogues, par exemple tu écris :
Vite !!! Cria une voix masculine. Dépêche toi ma chérie !!! -> tu ne peux pas mettre autant de points d’exclamation après chaque phrase et tu aurais dû normalement écrire Vite ! cria une voix masculine. Et ce genre de fautes, tu en fais beaucoup.
- La solution : https://www.aproposdecriture.com/regles-typographiques-du-dialogue ; si tu suis ces règles, normalement ça devrait le faire.
- Des fautes d’orthographe mais corrigeables avec un peu d’attention.
- La solution : se relire après chaque chapitre
J’ai été très rapide sur cette partie car Maxine, la correctrice, t’enverra le texte corrigé dans sa globalité.
En conclusion,
A chaque fois que je pense à ton œuvre j’en sors frustré. J’y vois vraiment un gros potentiel et je pense que si on reprenait tout depuis le début, des thèmes aux projets, on pourrait vraiment en sortir quelque chose de bon, voire très bon.
Ton œuvre est exactement la raison pour laquelle j’ai lancé Plumavitae : amener plus loin des projets d’auteur. J’ai aussi remarqué un soudain changement de style en plein milieu de la rédaction, preuve que tu te cherches encore et que tu as possiblement reçu des conseils pendant ton projet. C’est top, mais si tu nous rejoins on ira plus loin et plus fort.
Que la Plume soit avec toi !
Kev’Angi, le Tyran
Sache que ce que je fais dans cette critique n’a rien d’exceptionnel :
- si tu es un Auteur, tu peux être accompagné(e) sur toute ton oeuvre ou bien recevoir une critique audio
- si tu es un Lecteur ou un Correcteur, je peux te payer pour aider des auteurs du monde entier
On recrute, alors n’hésite pas à t’inscrire ou à partager. Que la Plume soit avec Toi !
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